lundi

Jusqu’au coude...

Pour Toi
Je me couperai un doigt
Jusqu’au coude
Je m’arracherai une oreille
Tout seul
Avec les dents
C’est pas facile
Et ça prendra du temps
Le temps d’avoir un dentier
Je me laverai plus les dents


Pour Toi
Je marcherai à genoux
Avec les chaussures lacées autour du cou
Je ne sais pas où j’irai
Mais j’irai d’un bon pas
N’importe où
Pour te trouver là
Où tu n’es pas
Et que tu ne me voie pas
Approcher


Pour Toi
Je porterai une enclume
Plus lourde que moi
Mais plus légère que celle
Qui me noue qui me broie
En dedans
Je t’en ferai un autel
Dans les bois
Un totem en fonte
Qui ne rouillera pas
Et sur lequel
Je cognerai des heures
Pour me calmer
Avec les bras
Pas avec les coudes


Pour Toi
Je me ferai couper les cheveux
Que j’ai à l’intérieur de la tête
Et qui me chatouillent si fort
Quand je te vois
Quand tu souris si bien
Et je souris si mal


Pour Toi
Je marcherai en canard
Et j’aboierai comme une grenouille
Et je descendrai les Champs-Elysées
En rollers
Ce sera le plus difficile
J’aime pas les Champs-Elysées
Et ça descend vachement

Pour Toi,
Je nagerai à quatre pattes
Avec un poisson
Entre les dents
Et un casque en entonnoir
Et un collier de fleurs en corail
Et tu rira tellement
Que tu oubliera
Tout ça


Mais pour Toi
Je crois
Que je m’enfonce déjà
Le doigt dans l’oeil
Jusqu’au coeur
Jusqu’aux pleurs
Et je m’enfonce
Et ça fait très mal aux cheveux
Et aux genoux
Et aux coudes

Alors je ferai tout le reste que j’ai dit
Sans réfléchir
Et sans respirer
Cela me reposera
Et m’évitera de penser qu’à force de te gêner
Tu puisse simplement vouloir m’éviter
Pour te sauver
Pour me protéger
De l’amour que j’ai pour Toi

Et que je ne te dirai plus.



Any Nomous, 2005.